dimanche, novembre 24, 2024

Le wokisme serait-il un totalitarisme ?

Le wokisme serait-il un totalitarisme ? se demande Nathalie Heinich, auteure d’un essai chez Albin Michel. La réponse de la sociologue du CNRS et membre de l’Observatoire des idéologies identitaires est « oui ».

Oui pour un totalitarisme d’atmosphère, spécifie-t-elle. Et d’expliquer que wokisme peut se traduire par « vigilantisme » ou « éveil systématique envers toutes formes de discrimination à l’égard des minorités », mais qu’il peut être emblématique de dérives et de surenchères, de positions dogmatiques, d’impositions de thématiques, d’interdits terminologiques.

Ainsi, selon elle, les victimes se dressent parfois les unes contre les autres pour mieux combattre leurs ennemis.

C’est dire qu’à force d’outrances, une cause pourtant largement fédératrice en vient à éloigner une partie de ses possibles soutiens, lesquels n’acceptent pas l’écrasement des valeurs de liberté, de justice et de rationalité sous le fanatisme woke.

Le communautarisme ou affirmation systémique de l’identité raciale flirte souvent avec le racisme prétendant faire de tout Blanc un privilégié, un profiteur du colonialisme, un ennemi du peuple de couleur, d’où une haine de l’Occident qualifiée d’hespérophobie. Certains y ajoutent la haine des juifs ou évoquent le complot judéo-maçonnique, par exemple.

Le wokisme est une importation directe des formes américaines de militantisme en faveur des droits des minorités sur fond de communautarisme.

L’absurde confine à la bêtise pure quand, exemple concret, des étudiants américains ont exigé que le mot « champ » c-h-a-m-p ne soit plus utilisé dans les cours car cela rappelle les champs de coton, donc l’esclavagisme.

En France, on en est à la déconstruction en tendant à s’affranchir des expériences et des normes scientifiques de disciplines traditionnelles.

Autre cas sensible : les caricatures qui valurent les drames à Charlie Hebdo et celui de Samuel Paty : confondre liberté de croyance et interdiction de critiquer cette croyance revient à étouffer la liberté d’expression, par la menace qui bâillonne ou par les armes qui tuent.

Ainsi, le défenseur des croyances présente celles-ci en victimes de la liberté d’expression là même où c’est en leur nom qu’on égorge et qu’on décapite. Bienvenue en tartufferie, clame Nathalie Heinich.

Dorénavant, certains ne militent plus contre le grand capital, l’illibéralisme, le fanatisme, le négationnisme, mais ils font fait glisser le démocratique concept de multiculturalisme vers le communautarisme identitaire, celui-ci ayant tendance à virer vers le totalitarisme.

Pourtant n’avoir rendre de comptes qu’au collectif abstrait du genre humain, offre une liberté beaucoup plus grande que de devoir afficher en permanence à un collectif sa prétendue communauté.

Dès lors, il faut que des causes légitimes ne soient plus défendues par des moyens totalitaires et que la chose soit bien entendue, combattre le wokisme n’est pas refuser de lutter contre les discriminations, conclut l’auteure.

À vrai dire, les valeurs démocratiques fondamentales, celles, entre autres, de l’universalisme de la Déclaration des droits humains, de la rationalité scientifique chère à Descartes, de la liberté d’expression prônée par La Boétie, de la laïcité des Épicure, Averroès, Diderot, Voltaire, Jefferson, Ferry…, toutes ces valeurs fondamentales sont mises à mal à partir, certes de louables intentions de lutte contre les discriminations, mais certaines flirtent avec des tentations totalitaires qui rappellent de sombres passés.

Alors, face aux dérives du wokisme, il serait judicieux de citer cette déclaration de Descartes clamant que « le bon sens est la chose au monde la mieux partagée. »

 

 

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