C’est au cœur d’un parc de la capitale de l’Europe[1] construit sur un ancien cimetière que l’artiste Clara Thomine décida d’intervenir avec son nouveau projet « Pleure(nt) les glaciers ». Elle avait choisi ce parc pour ses chemins dallés constitués d’anciennes pierres tombales et qui allaient connaître un nouveau destin, celui de commémorer des glaciers disparus.
Une œuvre engagée qui pointait de manière décalée l’urgence climatique par un glissement de paradigme ouvrant les possibles. L’œuvre éphémère ainsi constituée a vécu plusieurs semaines et s’effaça au fil du temps, avec le passage des promeneurs, des joggeurs, de la pluie …
À l’heure de la COP 27, comme tant de glaciers, il ne reste plus rien de cette œuvre, il ne reste que les allées de pierres tombales et un panneau reprenant le texte que je vous lis et qui vous dirige vers le site internet ad hoc.
Pour nourrir son projet, Clara Thomine s’était appuyée sur le monde scientifique. Des dizaines de spécialistes de la question lui avaient apporté un nombre important de données précieuses. Des climatologues du Mexique, des États-Unis, de Grande-Bretagne, du Kenya, de Colombie, d’Italie, de France, Suisse, Islande, Allemagne, Autriche, Équateur ou encore Antarctique avaient partagé leur expérience, apporté un éclairage sur la question et désigné les glaciers disparus significatifs pour eux.
Pour ma part, j’ai relevé des traces des glaciers Josef dans la Vallée du Grand Riff au Kenya, disparu en 2004, celui de Calderc dans les Apennins en Italie, disparu en 2009, celui baptisé OK dans les Hautes Terres islandaises et disparu en 2019, également celui de la Sana dans les Alpes françaises et celui de Meren en Indonésie, rayés de la carte respectivement en 2006 et en 2002…
Ces glaciers disparus touchent-ils la conscience des politiciens et des citoyens ? Un graffiti en doutait : « Et vous pensez vraiment arrêter la catastrophe climatique en roulant à vélo ou en trottinette électrique ? »
Philippe Lançon, auteur et journaliste, constate qu’il n’y a pas la moindre émeute quand un glacier vieux de 18 000 ans a complètement fondu au Mont Chacaltaya en Bolivie, mais, dit-il, on se bat à l’entrée de magasins lorsqu’arrive le dernier iPhone : « Il arrive un moment où ; face aux conséquences de leurs actes, on n’a plus envie de faire la psychologie des gens de pouvoir », déclara-t-il encore, désabusé.
Pour notre part, tant à Fréquence Terre que personnellement, pas question de baisser les bras : la lutte continue !
[1] Woluwe-Saint-Lambert
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