L’autrice Marguerite Yourcenar a été la première femme élue à l’Académie française, c’était en 1980. Trois ans plus tôt, elle avait fait état de Bailleul dans son ouvrage Archives du Nord, livre de mémoires autobiographiques.
Elle y évoquait la vie de ses aïeux paternels, les Cleenewerck de Crayencour, l’histoire de Bailleul et de la Flandre française.
Par cet écrit, “elle donna une portée universelle à cette famille de la haute bourgeoisie du Nord”, selon Fabienne Viala dans son essai Le Labyrinthe du monde de Marguerite Yourcenar.
Cette dynastie des Crayencour “s’offre comme miroir où se reflètent les vices et les vertus de la nature humaine”, precise-t-elle.
Un monument est dédié à Marguerite Yourcenar à Bailleul, il est situé en face du Musée Benoît-de-Puydt, du nom d’un mécène natif de la cité.
Une belle occasion de se rendre dans ce lieu où des « Tableaux fantômes » attendent les visiteurs, œuvres qui, effectivement, méritent une attention particulière.
D’ailleurs, Bailleul fut décrite par des Anglais comme le « Petit Cluny du Nord » grâce audit musée, que j’ai visité sous l’aimable conduite de Justine Thorez, assistante du régisseur des œuvres :
« Louis-Henri Hans, un ami de Benoît De Puydt a légué quelque quatre-vingts objets dont une soixantaine de peintures.
Malheureusement, elles furent pratiquement toutes détruites durant la Première guerre mondiale, alors que la collection du musée l’était à plus de 80%.
De ces quatre-vingts objets, il reste cinq peintures et un bénitier en ivoire.
Le deuxième conservateur du musée avait réalisé une description très détaillée de cette collection de peintures de Louis-Henri Hans. Elle fut retrouvée et le troisième conservateur eut l’idée de mettre les textes au format des tableaux. Ils sont exposés sur le mur comme des peintures.
En lisant ces textes on peut imaginer la collection de peintures que pouvait posséder le musée.
C’est un concept original en France, que l’on ne retrouve pas dans d’autres musées. »
Néanmoins, dans la foulée de ces textes exposés, un projet a été lancé il y a une dizaine d’années :
« Luc Hossepied, directeur de la plus petite galerie du monde -ou presque – à Roubaix, a proposé à des artistes contemporains de réaliser des œuvres en s’inspirant des descriptions écrites, comme ‘‘Sur une pelouse devant un épais massif de verdure…’’
Ces artistes ont repris des textes, ont effectué des recherches et trouvé de la documentation sur les peintres de l’époque et ont donc réalisé des œuvres contemporaines : peintures, photographies, dessins, céramiques…
Et ces œuvres sont visibles au deuxième étage du musée ! »
Assurément, outre les lieux décrits dans une précédente chronique, tels le beffroi qui repose sur une salle gothique sauvée des bombardements, la fontaine de la place Liénart et ses dauphins qui supportent la vasque de bronze, le tympan des Corporations de l’église Saint-Vaast, le Présidial, l’École dentellière…, le Musée Benoît-de-Puydt propose un superbe cabinet en écaille « que l’on achetait comme on aurait acheté un tableau », et, justement, voici trois tableaux, parmi des dizaines, qui m’ont plu : Scène dans un café lillois d’Albert Dequène (1924) ou c’est extraordinaire Trappiste jardinier au Mont des Cats d’Émile Salomé (1877), voire La mort de Dom Lacaes par Pierre-Louis-Joseph De Coninck en 1893.
Quelques trésors européens enrichissent ce sympathique musée, dont l’Adoration des Rois Mages attribuée à Pierre Breughel II, une Vierge à l’enfant sculptée au XIVe siècle, des céramiques hollandaises, flamandes, orientales…
Reportage photographique : Marie-Paule Peuteman
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