Davantage habitué à lire des essais que des romans, dans Pollution, le roman de Tom Connan paru chez Albin Michel, je fus gâté : à la fois une histoire fictive particulièrement bien enlevée, avec trois personnages principaux, David, un Parisien saturé de sa vie urbaine, Iris, adepte des réseaux sociaux, des selfies, de live sur Instagram, Tik Tok et You Tube, tous deux se retrouvant dans une ferme « pour une mise au vert à la campagne » non loin de Cherbourg, mais, ce livre, c’est surtout un véritable documentaire d’une rare précision sur les affres vécus par le duo et tous les citoyens de la région lors de la pandémie et les ravages de la centrale nucléaire de Flamanville.
À savoir, des vaches mortes ou dans un mauvais état, des êtres humains frappés de cancers, des terres rares, des champs électromagnétiques, de la contamination aux métaux, des lobbies du nucléaire, bref, le vocabulaire trop bien connu des écologistes qui luttent encore contre ledit nucléaire, même si l’Europe en a fait, sans le moindre remords, une énergie prétendument « verte ».
Le duo parisien se retrouva avec Alex, le fils des fermiers. Lui, il rêvait de quitter le bled et de faire carrière dans l’événementiel. Eux trois, vécurent, coincés, entre leur addiction aux technologies nouvelles et un scandale sanitaire. À une sorte de mort lente de notre modèle de civilisation, en somme.
Je cite : « On vivait dans un monde étrange où des boîtes privées, dont les finalités purement commerciales ne faisaient aucun mystère, en savaient plus sur l’humanité que la totalité des États réunis. Les gouvernements n’arrivaient même pas à anticiper les lits nécessaires pour pouvoir absorber l’épidémie en cours, en revanche, les GAFA connaissaient mes goûts politiques, mes affinités sexuelles, mes peurs, mes désirs professionnels et, bien sûr, mes allées et venues. Mais cet invraisemblable transfert de pouvoir ne choquait pas grand monde à la surface de la terre. »
La confusion mentale était amplifiée par les complotistes de tout poil, explique encore l’auteur. Même par ceux qui n’y connaissaient rien et se lançaient dans des analyses scientifiques complexes que seuls les meilleurs experts pouvaient en théorie mener.
La même chose concerna les dégâts de fuites à la centrale nucléaire : le déni systématique des politiciens régionaux, biberonnés au lobbying et arcboutés aux concepts de la rentabilité économique et à l’emploi au détriment de la santé publique et du bien-être citoyen.
« Certains avaient tellement envie d’entendre ce qu’ils voulaient entendre que lorsque leur désir n’était pas satisfait, et que la vérité scientifique n’allait pas dans leur sens, ils niaient l’évidence en affirmant tout et n’importe quoi. »
Jusqu’au jour où, ce fut l’alerte générale…
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