lundi, novembre 25, 2024

Exclusif : Quand sera-t-il définitivement fini le « bon temps des colonies » ? (Partenariat avec POUR)

Un débat sociétal et historique commence enfin à prendre de l’ampleur : faut-il déboulonner les statues et débaptiser les rues et avenues au nom du roi Léopold II (1835-1909) fort nombreuses en Belgique, mais aussi dans le 16e arrondissement à Paris, à Villefranche-sur-Mer, à Nice…, voire un arrêt de bus à Auteuil ?[1] En effet, le deuxième roi des Belges, considéré comme un « roi bâtisseur » (transformations de Bruxelles, d’Ostende, édifications de serres royales, de l’Arc de Triomphe de la capitale, de parcs publics, de digues…) avait aussi acquis deux grands domaines sur la Côte d’Azur et y avait implanté des palmiers exotiques.
Sa richesse personnelle était colossale, en plus de recevoir une donation grâce aux prélèvements effectués par l’État chez les citoyens. Non élu démocratiquement, ce chef de l’État aux pouvoirs pas seulement protocolaires, avait, en réalité, bâti une grande partie de sa fortune au Congo dont il en avait fait sa colonie.
Mais, et ceci est fort peu prisé par les royalistes pour qui le sujet est tabou depuis des décennies, l’Histoire fait de plus en plus ressortir les conclusions d’une Commission d’enquête internationale mettant en lumière l’exploitation éhontée et les mauvais traitements infligés au peuple congolais : esclavage, malnutrition, mutilations, dont l’affaire des mains coupées, au point qu’en 1905, Mark Twain s’exclama que Léopold II était « le roi aux dix millions de morts sur la conscience » !
Du coup, je résume, le Congo passa de l’escarcelle du roi catalogué de « génocidaire » à l’État belge, qui continua à exploiter ce vaste pays jusqu’à son indépendance en 1960.
Enfin une réaction « officielle »
Quand on connaît la mainmise de la royauté en Belgique, remettre en cause ce roi (tout comme la monarchie, d’ailleurs) tient de la gageure.
Cependant, après l’action éparse de citoyens qui, par exemple, scièrent les mains de Congolais d’une statue sur la digue ostendaise saluant l’œuvre de Léopold II, avoir renversé son buste dans un parc bruxellois ou badigeonné de rouge une autre statue au cœur de la capitale de l’Europe, voici enfin une réaction officielle émanant de la direction du Musée ROYAL de l’Afrique centrale qui placera sous peu un panneau avec un texte particulièrement critique à l’égard du roi Léopold II près du monument « The Congo, I presume ? » (photos P.Gf).
À savoir, une sculpture de Tom Frantzen inaugurée en 1997 dans le parc de Tervuren adjacent audit musée, cela dans le cadre du centenaire de l’exposition coloniale !
Si, personnellement, j’étais toujours choqué de voir ce monument grandiose, aujourd’hui, je ne le suis plus du tout. Que du contraire ! En voici la raison et l’objet de ce reportage sur place pour Fréquence Terre : « Le panneau indiquera que les trois guerriers africains sans pieds sont « exposés tels trois trophées personnels du roi » et que ce monument « de commémoration satirique » constitue « le seul ensemble de statues anticoloniales » de Belgique, que l’éléphant détourne son regard du buste et « prend ses distances, de manière symbolique, du pillage de l’ivoire grâce auquel Léopold II s’est enrichi éhontément ». Le paon fait lui référence « à la vanité, la mégalomanie et l’orgueil de l’homme.  »
Est-ce enfin le réel départ d’une prise de conscience que le « bon temps des colonies » n’a été qu’un vaste crime contre l’humanité de la part de ce roi, de ses semblables et des sbires à leurs bottes ?

[1] Je sais que des réflexions en ce sens ont lieu dans l’Hexagone et que, peut-être, au moment de réaliser la présente chronique les choses ont évolué…

Musique : Michaël Mathy.

Photos : Fréquence Terre.

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