En 1976, durant une semaine, participation à la Marche internationale non violente pour la démilitarisation entre Metz et Verdun en compagnie de centaines de pacifistes, d’objecteurs de conscience, de sympathisants, dont Théodore Monod, Wolinski, Cavanna, Cabu…
Si, parfois, des « poules mouillées, dégonflés et gonzesses » furent lancés par des « durs aux mâchoires d’acier », comme les décrivit Cavanna dans Charlie Hebdo du 12 août 1976, il expliqua ce comportement agressif de la manière suivante : « Ce qu’ils nous reprochent, c’est de ne pas aimer tuer. Qui n’aime pas tuer n’est pas un homme, pour eux. La guerre, c’est leur grande fête de la virilité. »
Quelque quarante ans plus tard, L’Union pacifiste rend un bel hommage à Cabu, en publiant plusieurs « Unes » de son journal dessinées par celui qui tomba sous les balles à Charlie Hebdo le 7 janvier 2015, mais, aussi, à Cavanna, son complice, cité comme un « grand écrivain pacifiste ».
Le journal L’Union pacifiste a pour devise une citation de Louis Lecoin (1888-1971) : « S’il m’était prouvé qu’en faisant la guerre, mon idéal avait des chances de prendre corps, je dirais quand même non à la guerre. Car on n’élabore pas une société humaine sur des monceaux de cadavres. »
C’est ce pacifiste qui, en 1963, fit plier le président de Gaulle au sujet de la liberté de ne pas porter les armes contre sa conscience, le général déclarant : « Il y a deux sortes de soldats, les engagés volontaires et les objecteurs de conscience. »
Liberté, c’était le nom donné par Louis Lecoin à son journal dont le but était la libération des nombreux objecteurs emprisonnés. Il reçut le soutien inestimable d’Albert Camus, Georges Brassens, Théodore Monod, René Dumont, l’abbé Pierre, Lanza del Vasto, Jean Giono, du couple de pédagogues Freinet…
Et, sans conteste, on peut dire que le journal de l’Union Pacifiste s’inscrit dans cette lignée, ce mouvement étant la section française de l’Internationale des Résistants à la Guerre (I.R.G.). Né en 1961, il est indépendant de tout groupe politique ou religieux, accueille tous ceux qui se reconnaissent dans le pacifisme intégral, le refus de toute armée et de toute guerre , lutte contre tout militarisme, les ventes d’armes, les accords armée-école, les essais nucléaires, il préconise le désarmement unilatéral, total et immédiat, idée développée en France par Louis Lecoin, en Belgique par Henri Lafontaine (1854-1943), Prix Nobel de la Paix en 1913 et Jean Van Lierde (1926-2006), pacifiste, chrétien, libertaire et initiateur du statut de l’objection de conscience.
Pour en revenir à Cabu, outre des dessins, l’album comporte de nombreux commentaires sur le général Bigeard, le nucléaire, les marches antimilitaristes, Mobutu, les tribunaux militaires, l’insoumission, le néocolonialisme, Hernu, les jouets guerriers, Chirac, la gégène, le Mur de Berlin, la Guerre du Golfe, Mitterrand, les femmes victimes de la guerre…, mais, je retiens sa déclaration au sujet de son antimilitarisme radical : « J’ai été militaire et c’est vraiment en Algérie que j’ai compris que malheureusement j’avais participé malgré moi à la dernière guerre coloniale. Par chance, je n’ai tué personne. »
Mais, pourquoi cette chronique, pourrait-on avancer alors que l’album date de près de trois ans ? Parce que, récemment, à l’émission C DANS L’AIR sur France 5, il fut abondamment question de chasses à l’homme et lynchages dans des rues d’une ville allemande, reflet de ce qui se passe dans toute l’Europe, mais aussi aux USA, dans certains pays d’Asie, avec le retour à visage découvert du néonazisme, de la nouvelle droite ultraviolente, des identitaires et de leur haine de l’autre, de révisionnistes provocateurs…, sous l’œil quasi débonnaire de politiques qui ne prennent pas assez en considération ces démons nationalistes, cette haine raciste déployée comme un étendard et qui, pour trop parmi eux, acceptent, voire pactisent avec les Le Pen, Salvini, Orban, Kurz, Trump…
Condamné pour, je cite, « atteinte au moral des troupes », Cabu avait commenté avec son humour traditionnel : « Les tares de la justice, plus les tares de l’armée, ça fait beaucoup. »
Gageons qu’au bruit des bottes qui se rapproche de plus en plus, il serait encore davantage monté à l’assaut !
Communiqué de L’Union Pacifiste : Encore disponible à l’UPF, ce bel album « collector » !
Sur plus de 50 pages, vous découvrirez tous les dessins que nous avait donnés Cabu l’antimilitariste pour la Une de notre journal « Union pacifiste », avec, en regard, un rappel de l’actualité de notre mouvement. Demandez-le contre un chèque de 10 € + 4,20 € de frais d’envoi, à l’ordre de l’UPF. Union pacifiste, BP 40196, 75624 Paris cedex 13.
Musique : extraits de la Marseillaise de la Paix, Chanson Plus Bifluorée et du Déserteur de Boris Vian, Youtube.
Podcast: Download
Merci Pierre Gueff pour ce bel article sur une publication que nous avons aimé présenter aux pacifistes et aux admirateurs de Cabu. Si vous passer de temps en temps par Paris je serai heureux de vous inviter à notre émission SI VIS PACEM sur Radio libertaire pour parler de notre ami Cabu et aussi du mouvement pacifiste en Belgique. Amitiés. Bernard Baissat
Cher Monsieur Baissat, un grand merci, aussi, pour votre message et l’invitation ! Lorsque le livre sera publié (2019) un exemplaire vous sera envoyé à Radio Libertaire (que je vais d’ailleurs renseigner dans mon ouvrage) ! À ce moment-là, nous aviserons pour un témoignage à votre émission. Toutes mes amitiés et confraternellement, Pierre Guelff.