lundi, novembre 25, 2024

1968-2018 : Che Guevara entre espérance et mythe (2/5)

Très belle peinture de José Chapellier, artiste belge, qui rappelle la « mythique » photographie d’Alberto Korda.

Cinq chroniques consacrées au 50e anniversaire de Mai 68 : Slogans, Radio Barricades, Che Guevara, L’« autre »  Mai 68 : pacifisme libertaire, désobéissance civile, activisme non violent, Les « enfants » de Mai 68, la presse alternative, Mai 68 perçu dans les médias cinquante ans plus tard…[1] Aujourd’hui, « Che Guevara  entre espérance et mythe »

Déclaration de Régis Debray au sujet du Che (Éditions Chroniques).

Pourquoi, plus de cinq décennies après son exécution en Bolivie, Che Guevara[2] suscite encore la nostalgie du modèle de combattant contre l’impérialisme et de la défense des opprimés, alors que, même son compagnon de révolution, Régis Debray, emprisonné et torturé, déclara que c’était « parce qu’il a une belle gueule » mais, surtout, « qu’il est mort avant de devenir un dictateur » ?

Chandails, tee-shirts, macarons, drapeaux, même dans des stades de foot !, autocollants, tasses, verres, cendriers, sculptures, timbres, briquets et autres gadgets à son effigie, des tonnes de livres, des milliers d’heures de reportages, des millions de posters (voir ci-contre), continuent d’être diffusés de cette icône du mouvement révolutionnaire mondial.

Lui qui fuyait comme la peste la société capitaliste, doit se retourner dans le mausolée érigé à Santa Clara.

Exceptionnel ouvrage consacré au Che par les Éditions Chroniques, 2013.

Che Guevara était un Argentin, brillant intellectuel, empli d’une idéologie magnifique à l’égard des peuples opprimés, mais qui n’hésitait pas à user de la violence pour asseoir sa vision d’un monde plus juste et plus humain. Médecin des guérilleros qui soignait les civils, sa priorité était politique et son romantisme cruel, dit-on, les aléas de sa vie familiale et sentimentale en seraient la preuve. Passionné du jeu d’échecs, son opération avec des « rebelles » congolais fut avortée, et, de cette courte existence, j’ai gardé quelques-unes de ses citations[3]. Une de 1953 : « J’ai juré de ne jamais m’arrêter avant de voir le poulpe capitaliste exterminé », une autre de 1959 : « La diplomatie est l’art de ne pas allier les actes à la parole », celle de 1967, le jour de son anniversaire : « 39 ans, c’est l’âge qui donne à réfléchir ».

Che Guevara[4] eut beaucoup d’estime pour les peuples du Tiers Monde, comme on disait à l’époque. Ceux qui luttaient pour leur indépendance. Il effectua deux visites en Algérie, en 1963, un an après son indépendance, et une autre en 1965. Il y félicita les combattants du Front de Libération Nationale (FLN) pour leur victoire sur, je le cite, « les impérialistes français ». Il considérait même Alger comme la « Mecque des révolutionnaires »[5].

Larbi Adouane, auteur algérien (Kabylie), avait 21 ans en mai 1968, après avoir vécu les affres de la guerre d’Algérie, entre autres.

Entre 1969 et 1971, dans le cadre de la coopération technique en Algérie, Pierre Guelff a rencontré l’un ou l’autre compagnon(s) cubain(s) du Che.

Entre 1969 et 1971, dans le cadre de la coopération technique à but humaniste, j’ai côtoyé Larbi Adouane, en Algérie, là, où, personnellement, j’ai rencontré l’un ou l’autre maquisard(s), dont des compagnons du Che lors de la révolution cubaine. Il se souvient de cette période :

  •  Qu’est devenu le slogan « Il est interdit d’interdire » ? Durant 1968, je faisais ma terminale à Alger, à l’École Nationale d’Ingénieurs et Techniciens. Parmi mes cours, il y  avait l’initiation à la philosophie avec un professeur coopérant français de gauche. Je ne pouvais donc pas ignorer cette période qui secouait la France, une partie de l’Europe avec des  répercussions  universelles. 
Larbi Adouane, auteur algérien.

Je suis devenu militant de l’organisation JFLN où j’animais une revue interne, qui fut vite censurée et interdite, mais ma passion première devint la lecture : Rousseau, Marx, Dostoeïvski… Je croyais dur comme fer au socialisme, les effigies de Lénine, Mao et de Che Guevara se succédèrent sur ma veste… Le socialisme me donna des ailes,  la misère sociale, les inégalités, les injustices….seraient vaincues …

Pour  les événements de Mai 68, ce fut, pour moi, un élan d’espérance de la jeunesse pour abattre les dogmes, les frontières, les inégalités de toutes natures. Après  cinquante années, quel bilan  peut-on tirer ?  Il paraît triste : la jeunesse semble avoir cessé de rêver ! C’est vrai que le monde est en plein bouleversement et la jeunesse est à la recherche de nouveaux repères !

Pour terminer cette chronique, je cite encore cette phrase du Che retrouvée dans son journal personnel et écrite peu avant sa mort : « Je n’ai pas eu le courage de tirer sur deux soldats dans un camion ». Peut-être que c’est l’un d’eux qui l’a abattu dans le maquis bolivien en 1967. Et, est-il mort debout, comme il ne cessait de le répéter : « L’homme doit marcher la tête haute, le front vers le soleil, dont la brûlure est l’empreinte de la dignité » ?

La prochaine chronique sera consacrée à Mai 68 et Bruxelles.

[1] « Night in white satin », Moody Blues, 1967, « Éloïse », Barry Ryan, 1968, « San Francisco », Scott Mc Kenzie.

[2] Extrait de « Hasta Siempre – Comandante Che Guevara » de Nathalie Cardone, 1997.

[3] « La chronique de Che Guevara »,  remarquable ouvrage (photo de couverture et dans le montage au début de la présente chronique) des Éditions Chroniques, Paris, 2013.

[4] Extrait de « Hasta Siempre –  Comandante Che Guevara » de Joan Baez, .

[5] Afrika.com, 2012.

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