L’accès universel à l’assainissement est un droit humain reconnu par les Nations Unies depuis 2010. Les Etats se sont engagés à assurer ce droit dans le cadre des Objectifs de Développement Durable.
Pourtant, selon l’UNICEF, 4,5 milliards de personnes ne disposent toujours pas de services d’assainissement gérés en toute sécurité. 1 milliard d’entre elles sont contraintes de déféquer en plein air, dans les champs, dans les buissons, ou dans les cours d’eau. Pour les autres, elles utilisent des seaux, des sacs plastiques, des trous, des toilettes partagées, ou encore des latrines très mal isolées.
Pour faire progresser la cause de l’assainissement, la Coalition Eau, Action contre la Faim et le Secours Islamique France lancent le 19 novembre, à l’occasion de la Journée Mondiale des Toilettes 2017, la campagne d’affichage « Parlons Toilettes ». Les ONG entendent sensibiliser « avec humour » le grand public et interpeller le gouvernement français sur une problématique bien réelle et dramatique.
Si se rendre aux toilettes et tirer la chasse d’eau est un geste naturel, une évidence pour la plupart d’entre nous, il ne faut pas oublier qu’un tiers de l’humanité n’a toujours pas accès à des toilettes décentes. Tous les continents sont touchés. Si 70% de la population de l’Afrique subsaharienne n’a pas de toilettes décentes, dans l’Union européenne, ce sont 20 millions de citoyens qui n’ont pas d’installations sanitaires correctes.
Conséquences : une contamination de l’environnement et des populations.
Comme ils ne sont pas stockés dans un endroit clos, ni évacués pour être traités, les excréments se disséminent dans l’environnement. Les microbes se propagent ainsi aisément partout, polluent les cours d’eau, s’infiltrent dans les sols, et contaminent les populations. Le fait d’ingérer ou d’être en contact avec une eau polluée par les excréments a des impacts graves sur la santé, diarrhée, choléra, typhoïde… Chaque année, la diarrhée tue environ 361 000 enfants de moins de cinq ans, soit plus de 1 000 par jour. Les maladies dites « hydriques » contribuent également à la sous-nutrition et à l’absentéisme scolaire. Et elles représentent des pertes économiques considérables.
Plusieurs facteurs expliquent ce manque tragique de toilettes. Selon les ONG, il s’agit notamment d’un manque de volonté politique, empêchant de traduire les engagements dans les faits. Dans les contextes où l’accès à l’eau potable n’est pas assuré, l’assainissement n’est pas toujours considéré comme une priorité. De plus, le lien entre manque d’assainissement et maladies n’est pas toujours assimilé par les populations qui n’en font pas une demande forte. Le coût des installations reste un obstacle pour des familles aux capacités financières limitées.
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Et puis la question des toilettes reste taboue. Etats, médias et citoyens considèrent ce problème comme relevant de la sphère intime, ce qui freine le développement de plans d’actions. La question du financement est aussi cruciale. Les fonds qui y sont consacrés restent cruellement insuffisants.
Pourtant, comme le rappelle les associations, un meilleur accès aux toilettes permettrait d’éviter 58% des cas de diarrhées dans le monde. Conséquence : le nombre d’enfants souffrant de sous-nutrition pourrait être divisé par deux. Des maladies en recul et un absentéisme scolaire qui diminue. 272 millions de jours de classe pourraient être gagnés chaque année. Les filles en particulier retrouvent leur dignité à l’école : l’accès aux toilettes préserve leur intimité et leur pudeur. Les femmes, particulièrement exposées aux risques d’agression en cherchant un endroit où se soulager, retrouveraient un peu de sécurité et de dignité. Le développement des infrastructures sanitaires permettrait aussi d’avoir un effet bénéfique sur l’environnement. Les cours d’eau, les nappes phréatiques et les sols seraient moins pollués par les eaux usées. Enfin, 260 milliards de dollars par an pourraient être économisés grâce à la réduction des pertes dues aux dépenses médicales et aux pertes de temps de travail.
Briser les tabous, forcer la prise de conscience politique, doter l’assainissement de financements conséquents, sensibiliser les populations, promouvoir les techniques simples, peu couteuses et rapides à mettre en œuvre… Voilà les solutions que souhaitent promouvoir les ONG impliquées dans cette campagne « Parlons toilettes ».
Cette campagne d’affichage déployée dans tous établissements partenaires en France, bars, restaurants, cinémas, clubs, stades, salles de sport, parcs des expositions, souhaite donc interpeller le grand public. Les ONG entendent également alerter le gouvernement français afin qu’il passe à l’action au niveau national et international.
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Pour aller plus loin :
- La campagne « Parlons toilettes »
- Une campagne d’affichage pour briser les tabous
- Coalition Eau
- Action contre la faim
- Secours islamique France
- UNICEF
- Des solutions pour faciliter l’accès à l’eau et à l’assainissement partout dans le monde
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Un grand merci pour cet article!! Je suis toujours consciente de mon privilège d’être née en France et de n’avoir que très peu connu l’insalubrité, qui hélas existe aussi dans notre cher pays. Privilégiée, surtout quand j’ouvre le robinet, que je vais à la douche, que j’allume le radiateur ou simplement quand je vais aux sanitaires en toute intimité et liberté. On ne devrait jamais songer que cela est plus que normal, sachant que bien des gens n’ont toujours pas a accès à tout cela, comme bien souligné par l’auteur. Rendez-vous compte qu’au royaume du Nippon, certains micro-appartements de Tokyo sont si exigus qu’ils ne disposent même pas de douches, les gens se rendent donc aux bains publics. Et dans mon ancienne studette à paris 5, j’avais droit aux sanitaires sur le palier à l’asiatique, un trou en somme!! Fort heureusement pour moi, je ne les partageais avec personne d’autre. Aujourd’hui, je revis de ne plus avoir à m’accroupir pour aller aux selles.En effet, même en France certaines personnes vivent dans des conditions d’hébergement indécentes, voire inhumaines.Les questions d’ordre sanitaires ne devraient donc jamais être tabous, on mange et on élimine, c’est biologique, ne pas en parler revient à nier ce processus naturel, en le considérant comme honteux. C’est sûr qu’aller sur la cuvette n’est franchement pas glamour, mais ne pas pouvoir se soulager dans des conditions dignes est bien pire à mon sens.Une bonne idée d’initiative pour les lieux où l’accès à l’eau est difficile, serait de créer des toilettes sèches, qui en plus d’être pratiques à bien des égards sont hautement écologiques!!