Le nouveau gouvernement du Premier ministre Edouard Philippe a été dévoilé la semaine dernière, le 17 mai. 22 ministres et secrétaires d’États ont été nommés par le président Emmanuel Macron.
Des ministres de droite, de gauche, et de la société civile, et parmi eux, une surprise, la présence de l’animateur et journaliste Nicolas Hulot à la tête du ministère de la Transition écologique et solidaire. Cette nomination laisse espérer de bonnes choses même si les craintes restent nombreuses.
- Avec Emmanuel Poilane, le directeur de France Libertés.
La présence de Nicolas Hulot à la tête d’un grand ministère de l’environnement est a priori rassurante, mais est-ce que ses positions très affirmées pourront être entendues au sein d’un gouvernement où certains membres ne sont pas totalement acquis à la cause écologique ?
« Il est en charge d’un ministère d’État qui inclue l’énergie. Connaissant le tempérament de Nicolas Hulot, c’était très important qu’il ait l’Énergie pour peser sur les décisions qui seront prises. Sa nomination va au-delà de ces points précis. Ce qui fait sa force, c’est sa conscience et son engagement pour la question de la lutte contre le changement climatique de façon globale. Nicolas Hulot n’est pas juste quelqu’un qui s’intéresse à l’environnement. Il a énormément travaillé pour imaginer une version compatible de la société avec la lutte contre le changement climatique.
Depuis plusieurs années, il est l’un des acteurs qui pose la question du capitalisme, tels qu’il est mis en œuvre aujourd’hui, comme chemin irréconciliable avec la possibilité de travailler réellement à la lutte contre le changement climatique. Cela tranche avec d’autres postes ministériels, notamment ceux confiés à des personnalités de LR avec Bruno Le Maire à l’Économie qui n’est pas du tout sur cette position. Ce sera très intéressant de vérifier les arbitrages et si Nicolas Hulot est bien le numéro 2 du gouvernement.«
Sur les solidarités, l’accès à l’eau, le droit à l’eau, est-ce qu’un ministre tel que Nicolas Hulot peut être un point d’appui pour les actions et engagements de France Libertés ?
« On est dans l’expectative. Ce gouvernement vaudra si et seulement si les législatives permettent de dégager une majorité qui soit compatible avec le gouvernement tel qu’il a été créé. Si on est dans la configuration d’un gouvernement qui s’installe et qui dure, alors un ministre, issu de la société civile devrait être plus à même à nous aider à faire avancer ces questions. Sur le droit à l’eau, nous avons eu la sensation, à tort ou à raison, que Ségolène Royal était plutôt un frein que réellement engagée à nos côtés sur le droit à l’eau.
C’est important pour les associations d’avoir un ministre issu de la société civile qui connaisse bien ces sujets et avec qui nous avons eu l’occasion de travailler ensemble. Cela peut changer la donne s’il a les pouvoirs de mettre en œuvre les politiques qu’il souhaite porter. »
Sur vos actions à l’international, comme la lutte contre l’extractivisme, le brevetage des savoirs des peuples autochtones ou sur les liens entre les entreprises transnationales, qu’espérer-vous du nouveau ministre sachant que le président Macron est un fervent partisan des traités tel que le CETA ou le TAFTA, alors Nicolas Hulot s’est clairement positionné contre ?
« A priori, Emmanuel Macron aurait garanti à Nicolas Hulot le fait d’enclencher un processus d’audit de l’accord du CETA pour en vérifier les tenants et les aboutissants en termes de lutte contre le changement climatique. Cela reste à vérifier. Mais cela montre qu’il y a eu des négociations entre eux sur ces points-là. C’est plutôt encourageant. Mais on sait que le ministère des Affaires étrangères est au cœur des négociations diplomatiques sur ces sujets-là. Avec l’arrivée de monsieur Le Drian, on peut être interrogatif.
Il faut espérer qu’il intègre bien dans ses nouvelles fonctions toute la dimension environnementale qui aura été au cœur de l’action de Laurent Fabius, notamment à la Cop 21. On avait un ministre des Affaires étrangères qui était très engagé sur la question environnementale. Il faut souhaiter que l’on ait demain un ministre des Affaires étrangères qui soit capable de travailler avec Nicolas Hulot de façon très forte. Avec l’accord de Paris, la France est légitime pour être au cœur d’un pool de nations ambitieuses sur le sujet. On attend du gouvernement qu’il soit sur ces lignes-là.
Avec Nicolas Hulot c’est possible. Soit il peut travailler et faire avancer sur cette ligne, et la société civile sera avec lui pour que l’on aille plus vite. Soit il ne peut pas et il faudra qu’il quitte ce gouvernement très rapidement pour ne pas perdre toute la crédibilité qu’il a aujourd’hui. »
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