Les chroniques « Ardennes françaises mystérieuses, sacrées et insolites » sont inspirées de l’ouvrage et d’émissions de Pierre Guelff aux Éditions Jourdan, à la RTBF et TV5 Monde « Ardennes Mystérieuses, Insolites et Sacrées ». Musique du générique : « Le Réveil ardennais. »(youtube)
En mars 2012, des élèves (5e A) du Collège Élisabeth de Nassau de Sedan, ont publié, sur Internet, un très intéressant « Sedan de A à Z » avec pour sous-titre « La Mémoire Vivante » :
« Il est bien loin le temps où Sedan n’était qu’un petit village. Au fil des siècles, la ville s’est étendue en se dotant d’un riche patrimoine architectural : un château fort, un second château au XVIIe siècle, des églises, un temple, une synagogue, des manufactures (telle la splendide Dijonval), des hôtels particuliers, des demeures de styles Art Nouveau et Art Déco, des constructions contemporaines, telle la nouvelle MJC le long de la Meuse… Mais la signature de Sedan, c’est surtout une alternance de pierres d’un calcaire jaune sable et de briques… »
Les personnalités qui ont marqué Sedan et sa région sont nombreuses et, à l’instar du sanglier qui pourrait être leur totem, il est souvent fait référence à son courage, à sa témérité, à une certaine sagesse (d’où des dénigrements et injures quand il est comparé au porc !), mais, aussi à sa solitude, à leur encontre. Parfois, à l’esprit batailleur…
Sanglier statufié à Sedan.
L’auteur Walter Scott (1771-1832, « Ivanhoé », « Le Pirate »…) inventa le « Sanglier des Ardennes » à travers « Guillaume de La Marche », frère de Robert Ier, un La Marck, seigneur de Sedan, alors que « Le Grand Sanglier des Ardennes » (ou « Robert le Diable ») était Robert II, le neveu dudit Guillaume. Sa devise était : « Si Dieu ne me veut aider, le Diable n’y saurait manquer ! »
Robert IV fit de Sedan une principauté. Succomba-t-il empoisonné, Charles Quint vouant une haine féroce aux La Marck (« Neuf La Marck ont fait Sedan en un siècle et demi », selon le guide touristique « Pays Sedanais ») ?
Le « Prince de Sedan », fils de Robert IV et de Françoise de Brézé, épousa chrétiennement une descendante de saint Louis… puis ils se convertirent au protestantisme, Sedan devenant un refuge pour les adeptes de la Religion réformée.
La paix religieuse régna de nombreuses années dans la principauté.
La « Petite Genève »
Genève était considérée comme la capitale du calvinisme et Sedan prit la dénomination de « Petite Genève » lancée par des catholiques « enragés », selon l’auteur Bernard Chopplet.
Mais, les Sedanais, qui voulaient continuer leur existence dans la paix et la fraternité, transformèrent cette ironie en une charmante comparaison !
De la « Petite Genève », il nous reste plusieurs constructions : le portail de l’ancien collège, l’Académie des Exercices (« Maison des Gros Chiens », académie militaire érigée par Henri de La Tour d’Auvergne, père de Turenne), l’église Saint-Charles-Borromée (construite autour de l’ancien Grand Temple ouvert au culte calviniste)…
La Maison des Gros Chiens, revenons-y :
« Ce bel ensemble des XVIIe et XVIIIe siècles est composé de plusieurs corps de bâtiments ordonnancés autour de cours intérieures.
L’Académie des Exercices créée au début du XVIIe siècle par le prince Henri de La Tour se situait à cet emplacement, son entrée demeurant dans la rue Berchet, au niveau du porche portant l’inscription « On a beau sa maison bastir, si le seigneur n’y met la main cela n’est que bastir en vain ».
Le bâtiment sur la rue du Ménil est l’hôtel particulier construit en 1629 pour le maître des forges Henri de Lambermont.
La « Cour des Têtes » est remarquable par ses mascarons représentant des figures allégoriques.
L’ensemble a été racheté en 1688 par Denis Rousseau, drapier de Paris, après la fermeture en 1685, sur ordre de Louis XIV, de l’Académie.
En 1726, la manufacture est devenue « Fabrique Royale de Draps Privilégiée ».
La Maison des Gros Chiens.
Turenne est né ici
Au pied du château fort, un panneau didactique spécifie que « Turenne est né ici ».
Ici, c’est la plus grande forteresse d’Europe qui présente une superficie de 35 000 m² construite sur un promontoire en bord de Meuse, il y a quelque six siècles (début de la construction en 1424), sur sept étages, les murs ayant sept mètres d’épaisseur.
Les activités (pacifiques !) y sont encore nombreuses : expositions, tournois d’archers et d’arbalétriers, contes de Noël, festival médiéval…
Turenne ? La légende prétend qu’Henri de la Tour d’Auvergne trouvait son fils Henri peureux. Celui-se rebiffa et démontra à son père qu’il avait tort : il passa une nuit dehors et on l’aurait retrouvé endormi sur un canon !
La plus grande forteresse d’Europe.
« Le maréchal Turenne, considéré comme l’une des plus grandes gloires militaires de la nation, n’est pas né en France. Il est né ici, le 11 septembre 1611, au château fort de Sedan, au cœur d’une principauté dont l’indépendance avait été officiellement reconnue en 1549.
Ses parents, les princes de Sedan Henri de La Tour d’Auvergne et Élisabeth de Nassau, se réjouirent de cette naissance car il n’était que leur second fils sur les six enfants qu’ils avaient déjà eus. C’est l’aîné, Frédéric-Maurice, qui héritera plus tard de la principauté, laissant à Turenne, de son vrai nom Henri de la Tour d’Auvergne comme son père, la carrière des armes.
Turenne n’est pas né en France, mais au château fort de Sedan !
On suppose que Turenne a pu voir le jour dans la salle à la Colonne, l’une des pièces les plus dignes d’accueillir les appartements de sa mère.
La légende qui fit naître Turenne dans la ferme fortifiée de Bazeilles est donc erronée. Tout au plus l’y a-t-on mis quelques années en nourrice.
En 1815, un écusson en pierre est posé sur le donjon, dans la cour du château. On peut y lire : « TURENNE NACQUIT ICI 11 7bre 1611 ».
Sur place, une question est posée au visiteur : « Voici la fenêtre de la salle à la Colonne où serait né Turenne. Saurez-
vous la retrouver sur la façade ? »
La réponse : fenêtre au milieu que nous avons entourée.
Maréchal de France à l’âge de 32 ans, la stratégie de Turenne était la guerre en mouvement pour prendre l’ennemi par surprise. Il sera source d’inspiration à Napoléon-Bonaparte, paraît-il.
Une époque à chaque coin de rue
« À Sedan, vous changez d’époque à chaque coin de rue », est-il encore spécifié à l’Office du Pays Sedanais.
Dans ces rues, il y a la Maison de l’Octroi, par exemple, située rue du Ménil.
Sedan fut une ville fermée aux envahisseurs par ses remparts mais, qui voulait y entrer des marchandises, devait payer !
Ces péages anciens s’appelaient des octrois et il y en avait à chaque entrée de la ville. Sedan en a conservé un, à droite de la Maison des Gros Chiens.
L’Octroi.
« Un Pays Sedanais, où il fait aussi bon visiter que vagabonder… », avec des sites culturels pour tous les goûts, des circuits de « Mémoire », trois conflits majeurs (Guerre de 1870, Grande Guerre de 1914-18 et Seconde Guerre mondiale de 1940-45) ont fait de la région un unique champ de bataille…
Ainsi, au cimetière Saint-Charles, les Allemands élevèrent un immense monument à leurs morts, un peu plus loin, sous des croix, des centaines et des centaines de prisonniers alliés, de civils, de morts au « Camp d’Empire de concentration de prisonniers punis », un véritable bagne créé en 1917 à l’ombre du château (un lieu « annonciateur » des atrocités nazies dans les camps de concentration ?)
Et puis, heureusement, ce Pays Sedanais, c’est aussi celui de la Nature verdoyante « pour réveiller ses sens » avec la Forêt de Sedan et son « Gros Chêne » ou « Chêne de Charles Quint » au diamètre de cinq mètres, c’est l’un des trois arbres ardennais dits « remarquables », et quelques étapes gastronomiques de choix avec, au menu, de la Salade au lard ardennaise, une Galette à suc’…
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