Les chroniques « Ardennes françaises mystérieuses, sacrées et insolites » sont inspirées de l’ouvrage et d’émissions de Pierre Guelff aux Éditions Jourdan, à la RTBF et TV5 Monde « Ardennes Mystérieuses, Insolites et Sacrées ». Musique du générique : « Le Réveil ardennais. »(youtube)
« Que de lieux jadis célèbres sont tombés aujourd’hui dans l’obscurité ! Attigny, autrefois résidence royale, connu par des ordonnances, par des conciles, et par différents monuments d’histoire, n’est presque plus qu’un modeste village qui n’a conservé de son ancienne splendeur que le titre de chef-lieu de canton », lisait-on dans le cinquantième (!) tome du « journal ecclésiastique, politique et littéraire », « L’Ami de la Religion et du Roi », publié en 1827 et imprimé chez Adrien Le Clere, « imprimeur du Pape et de l’Archevêché de Paris ».
Il est vrai que cette commune, Porte sud des Crêtes Préardennaises, traversée par l’Aisne et le Canal des Ardennes, peuplée de quelque 1 200 âmes, a un passé plus qu’étonnant, sans parler des malheurs inhérents aux deux guerres mondiales !
. En 638, Attigny fut acquis par Clovis II, roi de Neustrie et de Bourgogne, en échange de terres de Fleury-sur-Loire.
Saint Méen (VIe siècle) y aurait prêché. Voici ce que j’en disais dans un précédent écrit :
« Saint Méen est né en 520 au Pays de Galles. Disciple de saint Samson (l’un des sept fondateurs de la Bretagne), il accompagna ce dernier dans sa mission évangélique. Son tombeau à Saint-Méen-le-Grand (Bretagne), là où il planta un bâton et y fit jaillir de l’eau, fait l’objet d’un pèlerinage important. On y vient faire soigner la gale, d’ailleurs autrement appelée « mal de saint Méen ».
Mais, saint Méen fait l’objet de dévotion dans d’autres contrées : Périgord, Aveyron, Jura, Namurois, dans la forêt couvinoise, là où coule une petite source que l’on dit miraculeuse :
– En buvant chaque jour un peu de cette eau lustrale, vous serez guéri des maladies de la peau ou vous les éviterez. »
. En 647, Clovis II construisit un palais à Attigny.
. En 750, Pépin le Bref y tint une cour plénière.
. En 765 : assemblée générale de la nation, véritable concile où assistèrent vingt-sept évêques et dix-sept abbés.
. En 769, le roi Carloman s’établit à Attigny.
. En 771, Charlemagne y passa les fêtes de Noël et, en 772, celles de Pâques.
La Pénitence publique
. En 822, Louis le Pieux (ou le Débonnaire) y présida un concile ou assemblée générale des Francs. Il s’y soumit à la « Pénitence publique ».
De quoi s’agissait-il ?
Louis le Pieux était scrupuleux et… pieux ! Il ne supportait pas le désordre et avait pour principe de fournir de « bons » évêques à l’Église. Néanmoins, il appréciait faire la guerre et inféoda les Danois, les Bretons, les Basques…
Dominé par sa femme, Judith de Bavière (dynastie des Welfs), il était influençable et indécis.
À l’instar de Charlemagne, il divisa son empire entre ses enfants.
Le neveu de Louis le Pieux, Bernard, roi d’Italie, avait été maintenu dans son royaume sous certaines conditions de vassalité. Il ne l’accepta pas et prit les armes. Face à des troupes plus puissantes que les siennes, ce fut la débandade et il fut condamné à mort. Louis le Pieux le gracia, mais au lieu d’être exécuté, Bernard eut les yeux crevés ! Il se débattit tant – on peut le comprendre, quand même ! – qu’il aggrava ses blessures et il en mourut quelques jours plus tard. Louis le Pieux se dit désolé de cette issue et il décida de donner les seigneuries aux fils de Bernard, puis il fit pénitence publique à Attigny.
Cette attitude était courante à l’époque mais, comme le relate la chronique, « ce n’était pas une bonne démarche pour un empereur ! »
. En 834, autre concile (mais sans certitude historique).
Tour à tour, Charles le Chauve (823-877), petit-fils de Charlemagne, Charles le Gros (839-888), fils de Louis le Germanique, et Charles le Simple (879-929), fils de Louis le Bègue, se rendirent à Attigny.
En 916, Charles le Simple y aurait fait transporter les reliques de sainte Walburge.
Ensuite, « pendant les guerres des protestants, Attigny souffrit beaucoup par l’invasion et le séjour des troupes allemandes ; l’église fut profanée, le château détruit et les habitants s’enfuirent… »
L’hôpital fut supprimé et réuni à celui de Rethel en 1696…
Le Dôme de Charlemagne
Peut-être, aimerez-vous fouler ce sol hautement historique et mettre vos pas dans ceux qui furent des « grands » d’Europe ! Outre l’église Notre-Dame avec sa tour en partie romane, cette halte fluviale et ses sentiers pédestres balisés, certains empruntés par Rimbaud, paraît-il, il y a le « Dôme de Charlemagne », ou « Palais de Charlemagne », élevé au XVIe siècle sur les substructions (soubassements) du Palatium.
On y lit deux plaques commémoratives :
. Sur la première :
647 : Palais royal bâti par Clovis II
727 : Mort de Chilpéric II
760 : Cour plénière
765-822 : Assemblée générale des Francs
786 : Baptême de Witickind et d’Albion
. Sur la deuxième :
834, 865, 870 : Conciles
854, 858, 860, 869 : Colloques de rois
870 : Partage des États de Lothaire
907 : Charles III épouse Frédérune
À la « belle saison » (de juin à septembre), on compte également sur l’autorail « Picasso » pour découvrir la magnifique région de Vouziers.
Photo concile : Wikipédia.
Podcast: Download