dimanche, décembre 22, 2024

Eloge de la plante, de Francis Hallé, aux Editions du Seuil…

*Pourquoi, depuis tout
temps, l’Homme a-t-il porté plus d’intérêt aux animaux qu’aux plantes
?* C’est par cette question, légitime pour un botaniste, que *Francis
Hallé* débute son propos, et quel propos, dans « *Eloge de la plante* »,
aux Editions du Seuil.
Je suis biochimiste, et je dois bien l’avouer, j’ai pris beaucoup plus
de plaisir à étudier le règne animal sous toutes ses coutures durant mes
études, qu’à suivre les cours de physiologie végétale ou de botanique.
Et comme photographe aujourd’hui, je suis bien plus souvent à l’affût
d’une bête sauvage qu’à quatre pattes dans une mégaphorbiée.

Pourquoi cette différence de traitement, que l’on retrouve jusque dans
les peintures rupestres des artistes du paléolithique, est-elle si
exprimée dans notre espèce, allant parfois jusqu’à réduire le monde
vivant au monde animal ?
Ce zoocentrisme est également le fait de nombreux scientifiques, qui
dans de fameux ouvrages, ont ainsi résumé la vie à l’animal, parfois
jusque dans le titre. Cela ne laisse que peu de doute : la biologie du
vivant exige des modèles animaux.

Bien évidemment, l’anthropomorphisme est plus aisé dans le cas d’une
guenon, d’un chiot et même d’une abeille, que dans celui d’une
orchidée, dont les relations subtiles avec son insecte pollinisateur
sont pourtant frappantes. Cette flagrante altérité devraient nous
passionner, elle est en fait la raison de notre désintérêt, tant nous ne
prêtons attention qu’à ce qui nous ressemble, ce qui nous renvoie une
image de nous même et nous conforte dans l’idée supérieure que nous
nous faisons de l’humain.
«  »
*Les plantes portent ainsi de sérieux handicaps qui en font finalement à
nos yeux des objets d’ornement.*
Autant de fois vous ouvrirez vos volets le matin sur une cour, autant de
fois le platane qui s’y trouve vous y accueillera, dans une apparence
que seule la récurrence des saisons viendra modifier à vos yeux.
Tellement présent et immobile, il en devient transparent à des yeux
faits pour traquer le mouvement, même le plus imperceptible. Et lorsque
le vent viendra troubler son apparente torpeur, c’est une pie ou un
écureuil que vous espèrerez apercevoir.
«  »
Une torpeur dans l’instant, et c’est peut-être au fond ce qui nous
gène, nous, humains. Car les plantes évoluent *dans d’autres échelles
de temps*, des échelles qui nous dépassent et nous rappellent combien
notre vie est *éphémère*. Que penser alors devant des Oliviers, des
Séquoias, des Ginkgo de Chine ou des cèdres du Liban plusieurs fois
millénaires ? Trop souvent rien et ce sont alors les tronçonneuses qui
s’expriment, comme dans les forêts primaires d’amazonie.

Notre société s’accélère, et la vie est vécue de plus en plus vite.
Seule la chasse lui ressemble, alors que la cueillette ne peut se
consommer à la mode fast-food. Et c’est là qu’une divergence apparaît,
*entre les femmes et les hommes*, qui expliquent peut-être pourquoi les
premières sont plus proches des plantes, et les derniers si avides de
viande.
*Animale ou végétale, toute nourriture nous vient pourtant de ce règne
vivant, pourvoyeur d’oxygène et abri d’une faune que notre avidité
menace. Il est temps qu’une révolution verte remette les plantes à leur
juste place, au cœur du monde
vivant.*

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